Article 7: Des cas existants de vie humaine sous terre, des références à consulter

Depuis plus de trente ans la biosphère terrestre est menacée par le réchauffement climatique. Montée du niveau de la mer à cause de la fonte des glaciers, incendies des forêts à cause des températures élevées et bien d’autres bouleversements géologiques et biologiques qui pourraient déclencher l’extinction de nombreux espèces dont celle de l’homme. Inquiets de cette situation des chercheurs ont entrepris des recherches pour déterminer si l’homme pourrait habiter sur Mars ou la Lune. En effet lorsque leur habitat actuel change, voire même se dégrade, la migration est le réflexe naturel des espèces animales et l’espèce humaine afin d’assurer leur survie .Elle peut être temporaire ou définitive selon le cas. On peut citer la migration des oiseaux en hiver ou celle d’une population humaine à cause de la sécheresse par exemple. Mais ces recherches ont cessé car les Hommes s’investit à maitriser la situation et sauver la planète.Mais s’ils échouent et que l’espace n’est pas envisageable, il y a une autre alternative qui n’a pas été considérée, vivre sous la terre. La vie souterraine paraît tout aussi impossible que vivre dans l’espace mais les Hommes l’ont déjà expérimenté maintes fois, alors que nous apprennent ces cas sur la vie sous terre?

La cité de Derinkuyu

Aux VIIe et VIIIe siècles, l’empire byzantin a subi des attaques perses et arabes, notamment la cité de Cappadoce. En effet au VIIIe siècle elle était la cible de raids arabes fréquents et réguliers. Alors pour se protéger, les byzantins ont instauré tout un système de défense qui consiste à prévenir les attaques et installer les habitants dans des forteresses et des refuges souterrains.

Ces refuges vieilles de plus de 2500 ans n’ont presque pas subi les marques du temps et font aujourd’hui l’objet d’études scientifiques. On en a découvert une quarantaine, l’un des plus célèbres étant celui de Derinkuyu. Il est étendu sur 2500 m2 et 85 m de profondeur avec 8 niveaux ( découverts à ce jour) reliés par des couloirs en pentes. Il est construit autour d’un puit qui a servi de canal de ventilation et de source d’eau. Les pièces étaient aménagées pour les besoins des habitants durant leur séjour dans la ville souterraine: des cuisines, des chambres à coucher, des salles à manger, des toilettes, des étables pour leurs animaux se trouvaient aux deux premières étages, des églises, des armurerie, des lieux d’habitation… aux troisièmes et et quatrièmes étages. Derinkuyu pouvait accueillir quelques milliers de personne.

La résistances de ces structures souterraines à travers les âges impressionne les scientifiques, c’est pourquoi ils étudient les propriétés du tuf mou ,la roche dans laquelle elles sont taillées, mais surtout cherchent à déterminer les techniques d’excavation utilisées pour construire ces villes qui pourraient leur servir en géo-ingénierie.

Les villes souterraines de la Cappadoce nous prouvent q’une construction souterraine est tout à fait solide et durable avec de bonnes techniques mais il faut aussi considérer le types de roches pour une vie sous terre à grande échelle. En effet le tuf mou est une roche volcanique caractéristique de la région Cappadocienne plutôt facile à fouiller, propriétés que ne possèdent pas tous les types de roches de la Terre.

Deep Time:40 jours sous terre

Les habitants de la Cappadoce ont pu habiter ces villes sans grandes contraintes pour leurs activités quotidiennes et leur confort. Ils y vivaient le temps que duraient les attaques, mais il n’y a aucune information sur comment ils s’adaptaient à cet environnement souterrain . En effet vivre sous terre sans la lumière du soleil, loin d’un habitat qui n’est pas initialement le nôtre ne serait pas sans effet sur notre organisme.En 2020, le confinement lors de la pandémie de la Covid a affecté la population mondiale. Restée cloîtrer chez eux pendant des mois est opposé au rythme effréné d’activités auquel ils sont habitués. Cela à engendré une confusion totale menant parfois à la dépression. Malheureusement il n’y a pas beaucoup d’études scientifiques qui puissent apporter des réponses à cette situation. Afin d’y remédier , Christian Clot, un explorateur-chercheur, a mené en 2021 l’expérience Deep Time, une expérience hors du temps dans la grotte de Lombrives.

7 femmes et 8 hommes s’enferment pendant quarante jours dans cette grotte de 100 % d’humidité et de 10 degrés de température, sans aucune indication ni repère temporels. L’expérience porterait sur les mécanismes d’adaptation face à une condition anomique du milieu de vie et la capacité individuelle de perception du temps en l’absence de tout marqueur temporel.*
Les 15 deeptimers( c’est ainsi qu’on les appelle) vivent dans la grotte sans contraintes temporelles ou sociales: ils dorment et se réveillent comme le leur dicte leur corps, font ce qu’ils veulent quand ils le veulent. Le cycle veille-sommeil est le seul aspect chronologique car c’est ainsi qu’ils considèrent leur journée. Au cours de l’expérience ils sont passés par 3 phases:

  • Au début leurs cycles veille/sommeil ne concordaient pas, quand certains dînaient d’autres prenaient leur petit déjeuner. Car en fait nos horloges circadiens sont synchronisées au cycle jour/nuit. Alors sans lumière naturel et temporalité leurs cerveaux doivent s’adapter et trouver leurs propres chronologies pour ce qui est de leurs rythmes biologiques.
  • Il s’ensuit un engourdissement mental, ils étaient incapables de finir un projet due à une fatigue mentale et une perte de mémoire à court terme. Pendant que leur cœur et leurs poumons luttent pour s’adapter à l’humidité et la température, leurs cerveaux manoeuvrent à sélectionner les éléments qui pourraient servir à leur adaptation dans cet environnement différent de ce à quoi leurs organismes sont habitués. Ce qui requiert beaucoup d’énergie d’où la fatigue mentale et les pertes de mémoire.
  • Finalement leurs cycles veille /sommeil se sont synchronisés. Grâce aux différentes activités qu’ils devaient effectuer soit pour la vie collectif, pour l’expérience ou pour leur loisir comme l’exploration de la grotte, les tests qu’ils doivent effectués pour les études…leurs cycles veille-sommeil se sont raccordés. Ils n’étaient plus fatigués mentalement et avaient développé un nouveau rythme de vie collectif dans cet environnement qui était le leur depuis plusieurs cycles.

Les conséquences courantes d’une vie humaine sous terre sont un dérèglement de l’horlogerie naturelle qui entraîne aussi un décalage horaire par rapport à la surface, une fragilité aux maladies et aux infections due à une sécrétion prolongée de cortisol en aide à la lutte d’adaptation de l’organisme à cet environnement.
Ce décalage horaire est dû à l’absence de marqueurs temporels car ces expériences souterraines étaient toutes hors du temps. Mais dans l’éventualité d’une vie à grande échelle sous terre il n’y aurait aucune raison de s’en priver.

En avril 2023, lorsque Beatriz Flamini a battu le record du monde en un passant 510 jours dans une grotte à 70 mètre de profondeur à Los Gauchos, elle n’ a pas eu de séquelles graves mais les scientifiques lui ont dit que si elle y était restée plus longtemps sa physiologie et sa psychologie en aurait été très affectées. Mais l’Homme est un être social, il est donc logique qu’il soit affecté à cet état de stress permanent causé par la tentative d’adaptation de son organisme notamment s’il est seul. Deep Time est la seule expérience de ce genre en collectif, et on a pu observer que la collectivité a été déterminante à l’adaptation des deeptimers à l’environnement de la grotte. Les deeptimers ont surmonté la fatigue mentale pour parvenir à un rythme stable basé sur la vie collective car comme l’a dit Christian Clot : « Le collectif semble bien le plus puissant des sychronisateurs au delà de l’individu et de la biologie ».*

En fait tout l’enjeu réside dans la capacité d’adaptation de l’humain dans l’environnement souterrain. Il est évident que cette adaptation ne se ferait pas du jour au lendemain, il se doit être progressif mais suffisamment rapide pour que l’espèce humaine y survive. Et le collectif joue un rôle dans cette adaptation car l’implication dans la vie collective a permis d’acquérir des habitudes, ainsi le cerveau n’aura plus à épuiser beaucoup d’énergie pour traiter les informations nouvelles. Ce qui non seulement élimine la fatigue mentale mais aussi réduit l’état de stress.

Quoique j’ai omis certains aspects importants à la vie humaine nous avons pu tirer de ces expériences humaines sous terre que l’Homme est capable de construire des structures souterraines solides, durables et biens aménagées pour s’y loger correctement. Malgré une tournure prometteuse de l’adaptation des deeptimers à la grotte, cela ne nous permet pas d’affirmer ou non l’adaptation totale des humains à l’environnement souterrain sur le long terme. Alors des recherches plus approndies sont nécessaires pour y voir plus clair.

Bibliographie


Jolivet_levy, Catherine. « La cappadoce aux marges de l’Empire ». La Cappadoce, CNRS éditions, 1997, https://doi-org.docelec.ubordeaux.ffr/10.4000/books.editionscnrs.927.

Aydan, O., Ulusay, R.Geomechanical Evaluation of Derinkuyu Antique Underground City and it’s Implications in Geoengineering. Rock Mech Rock Eng. September 2012 vol.46, 731-754(2013). https://doi-org.docelec.ubordeaux.fr/10.1007/s00603-012-0301-7

CLOT, Christian, Deep Time : Quarante jours sous terre, une exploration hors du temps, Robert Laffont, Paris, 2021.

Dupont-Besnard, Marcus, 500 jours seule dans une grotte : pourquoi Beatriz Flamini a perdu la notion du temps ?, Avril 2023. https://www.numerama.com/sciences/1350914-500-jours-seule-dans-une-grotte-pourquoi-beatriz-flamini-a-perdu-la-notion-du-temps.html

Vancamp, Pieter, Pourrait-on, s’il le fallait, vivre lontemps sous terre ?, Le Point(The Conversation France), juin 2023.

* CLOT, Christian, Deep Time : Quarante jours sous terre, une exploration hors du temps, Robert Laffont, Paris, 2021, pge 214.

Par Fedia GERMAIN

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top